Sélection BD n°5

Mes dernières propositions de bandes dessinées commencent à dater un peu. Pourtant j’ai vu passer quelques pépites ! Alors voici un petit récapitulatif avec un focus sur le travail remarquable de Timothé Le Boucher.

Ces jours qui disparaissent de Timothé Le Boucher, Glénat, avril 2019

Un coup de cœur : un trait unique aux couleurs vives et aux aplats saisissants, un scénario hypnotisant et bouleversant, des personnages attachants, d’autres tout à fait exécrables. Tout commence avec une petite troupe, un acrobate, des amis soudés, un amour fort, une atmosphère douce et apaisante. Puis l’accident. Le dédoublement de personnalité. Cet autre que l’on veut apprivoiser. Cet autre qui prend de plus en plus de place. Mais qui est vraiment l’autre ? Je n’ai plus lâché les pages, un sentiment d’oppression dans ce temps soudain accéléré, le souhait que les journées ne finissent jamais, l’amitié et l’amour au-delà de la compréhension, l’envie de faire pause, de ne plus fermer les yeux, le cœur en apnée et mes émotions bousculées.

♥ 47 cordes – partie 1 de Timothé Le Boucher, Glénat, novembre 2021

Un jour, une métamorphe tombe amoureuse d’un jeune harpiste et décide de tout mettre tout en œuvre pour le séduire… J’ai beaucoup aimé le trait fin et particulier de Timothé Le Boucher, les couleurs froides mais apaisantes, la harpe omniprésente qu’il m’a semblé entendre à chaque page, le soupçon d’Eyes Wide Shut, le jeu de séduction subtile, les personnages aux caractères forts et l’intrigue qui m’a transportée. J’ai eu un gros coup de cœur pour cette bande-dessinée sur laquelle je laisse planer un peu de mystère mais que je vous invite grandement à découvrir. Une première rencontre pour moi avec l’auteur au travers de cette œuvre fantastique, musicale et onirique.

La conférence de Mahi Grand, d’après Franz Kafka, Dargaud, janv. 2022

Je ne connaissais pas cette nouvelle de Kafka et je dois avouer avoir été sous le charme : un graphisme un peu sombre pour donner une parfaite ambiance victorienne, un héros, gorille devenu homme qui fonctionne à merveille, des traits et des couleurs qui retranscrivent autant le texte de Kafka que des mots. A une période où les adaptations littéraires en bande-dessinée ont le vent en poupe, je trouve que Mahi Grand a su se démarquer dans le choix d’une nouvelle intelligente, où l’absurde sublime la réalité, où finalement tout comme le gorille nous tentons de nous fondre dans la masse, de ressembler aux autres pour ne pas faire de vagues. Chacun essayant ensuite d’apporter sa touche personnelle pour ne pas finir avec la sensation d’être prisonnier du quotidien.

Les étoiles s’éteignent à l’aube de Vincent Turban, d’après le roman de Richard Wagamese, Sarbacane, janvier 2022

J’ai eu beaucoup d’émotions à la lecture de cet ouvrage qui nous emmène dans un vrai voyage en seulement quelques pages. Franklin ne connaît pas vraiment son père, alcoolique depuis l’adolescence et qui ne l’a pas élevé. Mais la mort approchant ce dernier souhaite que son fils l’accompagne dans la montagne pour y mourir. Ce périple d’une centaine de kilomètres permettra aux deux hommes d’apprendre à se connaître, à Franklin de découvrir qui fut sa mère et à Eldon de parcourir les dernières marches vers une forme de rédemption. Le graphisme est un régal de chaque instant pour les yeux, le scénario est bouleversant et l’auteur nous mène avec adresse et sincérité sur cette route difficile, vers une aube qui verra les étoiles s’éteindre et un nouveau jour se lever pour le jeune Franklin. Sublime !

D’eau et de boue d’Adam Smith et Matthew Fox, Robinson, avril 2022

La couverture ne trompe pas. Les dessins de Matt Fox, jouant avec le noir, le vieux rose, le fuschia, des teintes de violet et de bleu nuit et de l’ocre jaune, nous hypnotisent. Le trait est épais mais les détails sont justes et les émotions nous submergent. Ce roman graphique est un vrai régal esthétique. Le sujet est sombre : enfant abandonné, démence, secte, deuil. Le scénariste n’épargne pas son lecteur. Si j’ai été happée par la première moitié de l’ouvrage et très enthousiaste, je me suis un peu perdue dans la seconde moitié plus confuse. Je pense qu’elle mériterait que je vienne m’immerger une fois de plus dans ce cauchemar humide, où l’eau purificatrice devient tout à coup source de malheurs, de mort et de visions terrifiantes.

Voleuse de Lucie Bryon, Sarbacane, février 2022

Ella est lycéenne, pas très ponctuelle et amoureuse de Madeleine. Et cela tombe bien car Madeleine a également un faible pour Ella. Mais un matin Ella se réveille avec une bonne gueule de bois, entourée d’objets luxueux qui se révèlent appartenir à Madeleine… ou pas ! Nos deux kleptomanes vont alors s’associer et mettre en place un plan infaillible pour rendre tous ces objets à qui de droit. J’ai eu un petit coup de cœur pour le graphisme, les planches en trois teintes (noir, blanc et une couleur pastel) et l’alternance pleine page et présentation un peu plus classique. L’histoire est tendre, drôle et touchante. On s’attache aux personnages et on les suit avec beaucoup de plaisir. Un roman graphique qui fait du bien tout en portant des valeurs fondamentales, à ne pas manquer !

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