Pour ce printemps les éditions Monsieur Toussaint Louverture ressortent la saga de Michael McDowell préalablement sortie en 1983 et qui connut un grand succès. A la manière des séries devenues une grande part de notre quotidien, la saga compte six épisodes, à raison d’un livre à paraître toutes les deux semaines. Nous voilà déjà à la moitié de cette œuvre intemporelle, il est temps de vous faire un premier retour.

Blackwater tome 1 : La crue, traduit par Yoko Lacour avec la participation de Hélène Charrier (260 p., 2022). Illustration de couverture par Pedro Oyarbide.
1919. Une petite ville de l’Alabama, entre fiction et réalité, entre les eaux de la Perdido et de la Blackwater, sous l’emprise de familles dignes de Dallas, est submergée par les flots. Les habitants n’ont pas été surpris et sont sains et saufs. Maintenant il faut reconstruire. Mais les eaux rouges, impitoyables et dangereuses semblent avoir amenées avec elles une jeune femme énigmatique qui ne va pas tarder à faire vaciller l’empire de la famille Caskey.
Une plume efficace, un format court proche des séries télévisées actuelles, une intrigue entre fantastique et prise de pouvoir où la guerre se joue entre femmes, six tomes qui sortent toutes les 2 semaines pour un effet addictif, une petite ville où la vie semble suivre son cours, jusqu’à ce que le couperet tombe et que certains personnages trouvent la mort dans d’étranges circonstances.
Blackwater tome 2 : La digue, traduit par Yoko Lacour avec la participation de Hélène Charrier (260 p., 2022). Illustration de couverture par Pedro Oyarbide.
Elinor, la jeune femme retrouvée suite à la crue fait dorénavant partie de la famille Caskey. Mariée à Oscar, mère de deux enfants, cette étrange créature qui nous subjugue et nous glace va se trouver désemparée face à l’arrivée d’Early, ingénieur un peu bourru, embauché par Mary-Love Caskey pour construire une digue à Perdido. Le jeu continue, Michael McDowell nous entraîne dans son sillage pour une lecture en apnée, à l’écriture toujours aussi efficace, entre douceur et cruauté, maisons hantées, sacrifices et mariages fomentés, la vie à Perdido est loin d’être un long fleuve tranquille…


Blackwater tome 3 : La maison, traduit par Yoko Lacour avec la participation de Hélène Charrier (260 p., 2022). Illustration de couverture par Pedro Oyarbide.
Me voilà à présent complètement happée par l’histoire. L’atmosphère oppressante se mêle étrangement aux règlements de comptes en famille. La Perdido est de plus en plus épaisse et boueuse. Nous avons le sentiment étouffant de nous y noyer. La maison se réveille et nous n’avons aucune envie de dormir dans la chambre d’amis. Les personnages s’affirment, la cupidité est reine et l’envie de posséder emporte les malheureux sur son passage. Heureusement que Grace, Danjo et James apportent un peu de douceur, sinon le lecteur se prendrait à son tour à ce petit jeu perfide sans scrupule et sans pitié. Le tome 4 vient de paraître et la couleur est annoncée, ce sera… La guerre !
🚣♀️ QUELQUES EXTRAITS 🚣♀️
Personne ne lui avait coupé la parole, pourtant Oscar laissa mourir sa phrase quand une soudaine révélation, aussi éblouissante que le soleil qui brillait dehors, lui traversa l’esprit. L’affaire avait été entièrement planifiée. Elinor avait compris que le seul moyen pour qu’ils quittent la maison de Mary-Love était de l’échanger lui, Oscar, contre quelque chose que sa mère aimerait davantage. Pour cette raison seulement, Miriam était née. Elinor n’avait pas tant donné naissance à une fille qu’à un otage. En laissant Mary-Love et Sister prendre soin jour et nuit du bébé, Elinor s’était assurée de leur indéfectible attachement. Aussi, la tentative d’Elinor de s’en aller avec son mari et sa fille n’avait été, en réalité, qu’une ruse, seulement une ruse. Elle avait prévu dès le début de leur offrir Miriam – de jeter l’enfant en pâture aux louves enragées, afin qu’elle et lui puissent s’enfuir sans être dévorés. […] Une heure plus tard, Elinor et Oscar étaient partis, abandonnant leur fille sans un mot.
Elle regarda plus attentivement. Bien que l’eau soit limpide et seulement assez profonde pour immerger un corps, elle avait produit une sorte d’illusion d’optique : vue à travers le courant, la peau de Mademoiselle Elinor paraissait différente, verdâtre, épaisse, presque comme si elle était faite d’une sorte de cuir – alors que sa peau, Annie Bell l’avait bien remarqué auparavant, était d’une blancheur d’albâtre. De plus, alors que la femme pasteur scrutait la forme sous l’eau, le visage immergé parut subir une transformation, pour se distordre. Ses traits, qui avaient été séduisants, fins et délicats, étaient à présent épais, aplatis et grossiers. La bouche s’étirait démesurément au point que les lèvres avaient disparu. Sous leurs paupières closes, les yeux étaient pareils à de larges dômes circulaires. Les paupières elles-mêmes étaient presque translucides, et la pupille barrait d’une fente noire l’énorme œil tel un équateur qu’on aurait dessiné à la verticale sur un globe terrestre.
Sans oublier la magnifique édition de Monsieur Toussaint Louverture, aux couvertures détaillées et ciselées et la sortie directement en format poche. Un très beau travail !
Avez-vous aussi une saga que vous affectionnez particulièrement ?
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